« Pour terminer ce qui se rapporte aux combles de la scène, je dirai prestement que la construction de ces combles en plomb est aménagée de façon que la circulation soit des plus faciles de toutes parts : trois rangées de larges marches en zinc montent de la base du toit à son faite, une à chacun des deux murs pignons, l’autre dans l’axe transversal, et que dans le sens des longs pans, se trouvent sept grands chemins horizontaux de circulation dont le supérieur a près de deux mètres de largeur. On peut donc parcourir le toit dans tous les sens, sans aucun danger, sans aucune entrave, et cette facilité de communication, si utile en temps ordinaire et qui deviendrait si précieuse en cas de sinistre, donne, par l’agencement des chemins qui la produisent, un aspect fort typique au grand comble de la scène du nouvel Opéra. »
Charles GARNIER
Vacances de février de l’an dernier, je retournais visiter l’Opéra Garnier avec ma fille et là, toujours la même frustration : ne pas pouvoir visiter les anciennes salles de cours des petits rats, ni la rotonde Zambelli… ni le moindre espoir de pouvoir un jour trottiner sur les pentes et admirer Paris depuis les toits de ce magnifique monument comme l’avaient fait dans les années 60 Delphine et ses copines du corps de ballet.
C’était L’âge heureux. Toutes les petites filles de ma génération découvraient la vie des petits rats et la discipline qu’exigeait leur engagement dans cette institution grâce à ce feuilleton de 1966, adaptation pour la télé du livre d’Odette Joyeux : Coté jardin, mémoires d’un rat.
Rivalité, jalousie, transgression de l’interdit, report des ambitions ratées de la mère sur sa fille, peur de décevoir, revanche… Depuis, Aronofsky a sorti son Black Swan et a ancré un peu plus profondément ces notions dans notre esprit (y’a juste une légère différence dans le traitement des thèmes… Une chose est sûre, on ne revoit plus Le lac de cygnes sous le même angle après cela : je viens d’en voir une version très académique il y a quelques jours, avec un prince au curieux balancé de hanches qui avait un peu trop travaillé l’ahurissement figé sur son visage à chacune de ses entrées… hmmm hmmm… c’est pas pareil quoi !).
Je rappelle l’intrigue ?
Allez, petit résumé :
Delphine Nadal vient d’être choisie par Ivan Barlof, maître de ballet de l’Opéra, pour interpréter le rôle principal de Galatée dans le ballet du même nom au détriment de Julie Alberti, pourtant première de sa classe de danse, qui ne sera que remplaçante. Alors que Delphine et sa copine Bernadette Morel se rendent à l’atelier des costumes pour un essayage, les deux amies franchissent la porte interdite laissée ouverte par des ouvriers et se retrouvent sur les toits du palais Garnier, s’extasient sur le panorama depuis là-haut et se dépêchent de raconter leur exploit à leurs camarades de classe puisque tout petit rat obéissant qu’elles sont, elles n’en cultivent pas moins l’espièglerie et le prouvent le soir même : profitant que la clé de la fameuse porte interdite est tombée dans un pot de peinture sous les yeux de Nadal et Morel, et donc facilement récupérable, les voici toutes à gravir les pentes des combles et à y jouer à cache-cache lors de la représentation du soir au lieu d’attendre sagement leur tour d’entrée sur scène dans leur loge… Tout aurait pu bien se terminer puisque deux ou trois poltronnes qui n’avaient pas voulu enfreindre le réglement sont restées dans le bâtiment et accourent pour avertir leurs copines délurées lorsque le moment vient pour elles de rentrer sur scène. Mais c’était sans compter sur la malveillance d’Alberti qui entrevoit tout à coup le moyen de récupérer sa place, qu’elle estime légitime, de premier rôle et enferme Nadal et Morel à la traîne sur les toits. N’ayant plus d’autre alternative, elles tentent de rentrer en brisant une vitre de la salle de cours et là patatras : la vitre est bien fracturée mais le tibias de la pauvre Bernadette qui s’est collée à la vilaine tâche d’un coup de pied se fracture aussi dans la chute qui s’ensuit… Le drame est en route : Delphine se fait renvoyer, ses copines d’embrouille la laissant assumer seule la faute, s’enchainent mensonges à sa mère, enquête de police, errances dans les rues de Paris, clé dissimulée-découverte-redissimulée, copines qui culpabilisent, maître de ballet qui prend la défense de la suspendue, répétitions de Julie-l’usurpatrice finalement confondue en voulant se débarrasser de la clé et héroïne réintégrée à l’Opéra qui finira, car à l’époque les feuilletons finissaient généralement bien, par danser son rôle de Galatée dans son beau costume et sa perruque de poupée !!! Ouf !!!
Ne pensez pas que j’ai une mémoire d’éléphant, je viens tout simplement de revisionner l’intégralité des épisodes grâce à deux liens trouvés sur Youtube :
> L’âge heureux – partie 1
> L’âge heureux – partie 2
Nota : sans compter le plaisir pris à retrouver ces images dont certaines étaient encore bien nettes dans ma mémoire, il faut reconnaître que c’est toute une ambiance du Paris de l’époque qui y est consignée, avec ses vues de la capitale, ses voitures, ses bus à plateforme, mais aussi l’enseignement de l’époque avec ses cours de morale, l’habitude d’appeler les élèves par leur nom de famille…
Le lien avec l’actu ? Et bien Odette Joyeux, auteur du livre et actrice du film où elle y joue la mère de Delphine, était dans la vraie vie la mère de Claude Brasseur que l’on retrouvera le 25 mars en invité d’honneur du Festival du film policier de Beaune où il lui sera rendu hommage.